mercredi 24 novembre 2010

Les solitudes

Un ciel délavé, froid, s'ouvre sur des solitudes en partage.
L'arbre se dresse devant moi.
Sa dernière feuille argentée défie les lois de l'automne. Mon sang n'est plus que sève. Je suis perdu dans ma lecture, dans tes caractères. J'aspire, je respire. Je te découvre en moi. Loin des sentiments feints, jetés à la volée, dont la spirale m'abreuve, je trouve un point d'ancrage.
L'arbre me tombe dessus.
La bouffée d'air est brutale, inespérée, elle me brûle la gorge, s'engouffre dans mon thorax, s'enracine dans mes chairs.
A l'aplomb de tes 200 millions d'années, je m'accorde un laps de temps, un instant tout au plus, balisé d'un sourire, ton sourire. Ton nom m'importe peu, ta présence me suffit. Je reprends ton souffle.
L'arbre s'enfonce dans l'hiver.

mardi 16 novembre 2010

Le déclin

Il resserre les doigts
sur de vils matins clairs,
les épaules froissées
affleurées de sang froid,
dérivant à l'excès,
tailladé à l'insu,
en cherchant au verso
les rectos défendus.
L'inégale chaleur,
indolente et sincère,
se faufile en silence
sous des cadres en bois.

dimanche 14 novembre 2010

Nature morte

Mourir en soi
désenlacé
cisailles en sus
sous-cutanées
la nature morte
de faux bascule
en un sourire
lèvre gercée.

Bouche cousue

Je me souviens de chacune de tes visites. Je te vois encore arpenter mon cabinet de curiosités, sous les cris sourds de mes oiseaux et de mes fauves de paille.
Combien de fois as-tu rêvé dans mon capharnaüm, devant mes bizarreries, mes collections d'insectes et mes bocaux sans vie ?
Parfois, même si tu n'exprimais rien d'autre que je ne savais déjà, il m'arrivait de croire que tout était possible, qu'il existait un endroit que l'on ne trouvait ni dans mes herbiers, ni dans mes vanités. Mais tu savais aussi qu'on ne vient pas chez moi par hasard et le temps vint où il fallut te faire peau neuve.
Te souviens-tu de ton sourire, celui que j'ai cousu sur ta bouche pour en garder l'attrait ?
Te souviens-tu que tu avais un coeur ? Que ton coeur sur la main, qu'il m'a plu d'arracher, je l'ai serré si fort au point de l'assécher ?
Te souviens-tu de notre dernière rencontre, de ce jour où j'ai dépouillé ton corps, du soin que j'ai pris pour le déformer et le recomposer en un semblant d'humanité ?
Tu ne t'en souviens pas ? Tu ne réponds pas ?

jeudi 11 novembre 2010

Les lucioles

Il est peut-être temps de sortir tête nue, de ralentir le pas et de faire courir mes mains sur le plat des murs.
Depuis peu, l'oeil a retrouvé son orbite. Il fixe sans jamais décevoir. L'oeil n'a aucun éclat, mais brille parfois en lorgnant ici-bas. Je peux observer, discerner et me fendre d'un nouvel angle de vue.

Au bout de mes doigts, les lucioles se réveillent. Leur souffle me démange. Je les vois pointer le bout de leur panse et se fondre en une lueur commune. J'ai par trop longtemps renâclé à les écouter. Je vais désormais les laisser m'amadouer et m'inspirer.

Quoi qu'il arrive, si la tentation de l'échec devient trop forte, si elle réprime mes élans les plus élémentaires, si mon crâne se fossilise sous son propre poids au point de ne plus pouvoir libérer l'écho de mes doutes, alors j'en prendrais la mesure et je rongerais mes peaux mortes.
Pour autant, aujourd'hui j'imbrique des mots et ne m'impose aucune restriction. Et si j'en juge par l'agitation, le mot d'ordre n'est pas de mise.